18 Mai 2021

France et Mexique : deux histoires qui se rencontrent

Pays et régions

Retour sur une histoire mouvementée mieux connue au Mexique qu’en France. A savoir afin d’éviter tout impair avec ses interlocuteurs mexicains.

France et Mexique : deux histoires qui se rencontrent

Une histoire commune méconnue

Confrontés à des relations professionnelles ou personnelles issues d’autres pays européens, les Français ont en général une assez bonne idée de leur histoire commune avec l’Angleterre et Allemagne, bien entendu, ainsi que des deux guerres mondiales du siècle dernier. Nombreux sont ceux qui ont aussi des notions de l’histoire complexe de la formation de la France, au travers de conflits incessants avec l’Espagne, l’Autriche, la Belgique, l’Italie, la Russie ou même la Suède ou la Norvège (guerres napoléoniennes), etc.

En revanche, face à des pays d’autres continents nous sommes souvent tentés de croire que les rapports sont lointains voire que l’histoire commune est inexistante. Bien entendu, je mets à part les anciennes colonies de la France ou même le Canada. Mais s’agissant de l’Amérique latine, il est bien connu que c’est un territoire « chasse gardée » de l’Espagne et du Portugal !

Pourtant, le Mexique, même s’il a peu concerné la France comme partie de la Nouvelle Espagne depuis la « conquista » au XIVème siècle jusqu’à sa création officielle comme pays indépendant en 1821, est un pays qui a eu fort à faire avec la France au XIXème siècle !

L’empereur du Mexique imposé par Napoléon III

En effet, si les Français l’ignorent souvent (en ce qui me concerne c’est un chauffeur de taxi de Mexico qui m’en a parlé le premier), les Mexicains savent très bien que deux guerres ont opposées nos pays au cours du XIXème siècle.  Et il vaut mieux s’en souvenir si on veut éviter de faire des impairs ou même de paraître ignorant ! Que dirait un citoyen britannique si un Français lui avouait ignorer complètement l’origine du nom de la gare de Waterloo ?

Eh bien il serait aussi étonné qu’un Mexicain à qui un Français dirait ne pas savoir quelle peut être l’origine de la fête du 5 mai : la « batalla de Puebla », au cours de laquelle, le 5 mai 1862, les habitants et soldats mexicains ont repoussé victorieusement un corps expéditionnaire français qui se dirigeait vers la capitale Mexico depuis le port de Veracruz. Ce débarquement avait pour but d’intervenir dans la politique intérieure mexicaine, sur fond de dettes non remboursées par le Mexique aux grands pays européens.

Ce 5 mai férié (non officiel) est en effet en quelque sorte la partie encore visible par tous d’un gros « iceberg historique » qui est le règne de 5 ans de Maximilien de Habsbourg (frère de l’empereur d’Autriche … et en qui une rumeur persistante voyait le fils du duc de Reichstadt, i.e. « Napoléon II »), comme empereur du Mexique, imposé par Napoléon III à la faveur d’un vide politique au Mexique, et maintenu durant cette période à l’aide des forces armées françaises !

Sans refaire l’histoire complète de cet épisode qui s’est terminé par la mort de l’empereur Maximilien, lâché par les troupes françaises au bout de 5 ans, et renversé par les Mexicains, on voit qu’il ne s’agit pas d’une simple vaguelette historique vu du Mexique, même si beaucoup de français n’en n’ont jamais entendu parler. On peut au passage citer un événement qui a été conservé dans la mémoire (militaire) française : il s’agit de la bataille de Cameron (Camarón en esp.), au cours de laquelle un petit groupe de quelques dizaines de soldats de la légion étrangère a résisté une journée entière à un encerclement d’un millier de soldats mexicains. Cet épisode fait aujourd’hui partie des traditions de la Légion Étrangère française et est célébré aujourd’hui encore au sein de l’armée mexicaine.

Toutefois cet épisode de l’histoire du Mexique, certainement le plus marquant dans la mémoire collective de ce pays n’est pas le seul qui lui a opposé la France. Il s’agit en fait du deuxième dans la fresque historique !

La guerre des pâtisseries

En effet, un autre événement militaire eut lieu entre 1838 et 1839 : La « guerre des pâtisseries » (« guerra de los pasteles » ou encore, dans les livres d’école : « Primera Intervención Francesa en México », ce qui est significatif).

Durant les années 1830 s’installe une période d’instabilité de la jeune république mexicaine ainsi que des sentiments anti-français envers des émigrants installés au Mexique et ayant pour certains des intérêts commerciaux importants.

Ceux-ci, commerçants pour la plupart, ont été victimes (comme d’autres) du désordre de l’époque : émeutes et pillages de la part de populations laissées pour compte, avec, notamment, un célèbre pâtissier de Mexico du nom de Remontel, pillé en 1833, qui demeurera le symbole des exigences des Français et de la guerre à venir. On signale d’ailleurs au cours de la période d’autres événements purement anti-français, et notamment des meurtres dans diverses villes du pays.

Ayant fait appel sans succès à la protection et à des dédommagements de la part du gouvernement mexicain, les Français du Mexique se sont tournés vers leur pays et sa diplomatie pour obtenir réparation. Après de nombreuses demandes françaises rejetées par les Mexicains, le roi Louis-Philippe décide en 1838 d’envoyer une escadre faire un blocus des ports mexicains sur l’ensemble de la côte atlantique, dont le port de Veracruz. Après diverses péripéties militaires et diplomatiques, le Mexique accepte de payer, la France retire ses troupes…et le paiement n’aura jamais lieu. Ce non-paiement fait d’ailleurs partie des causes qui fonderont la guerre suivante évoquée au début de cet article.

Sujets à connaître, discussions à éviter

Il est clair que ces événements n’ont pas vocation à meubler les déjeuners et conversations avec les partenaires commerciaux des Français au Mexique, ils doivent probablement même être évités autant que faire se peut à l’instar d’autres sujets de friction comme l’affaire Florence Cassez (plus de 10 ans déjà mais remise sur le devant de la scène en avril 2021 par le président AMLO lui-même…). Toutefois les connaître permet de montrer qu’on connait sa propre histoire et d’éviter des gaffes, notamment autour du jour férié du 5 mai, tant professionnellement que pour la vie privée d’expatrié !

En effet, pour finir, alors que nous habitions au Mexique, mes propres enfants se sont retrouvés avec leurs camarades d’école dans la cour du collège pour le Salut au Drapeau et l’hymne national à l’occasion du 5 mai…il vaut mieux dans ce cas là savoir ce qu’il en est !

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